Pass Vaccinal et communication de l’opposition
Si chacun s’accorde à reconnaître qu’il n’est pas facile de gouverner en période de crise sanitaire, s’opposer n’est pas non plus une tâche aisée, comme est en train de le montrer le débat sur le pass vaccinal.
L’annonce par Emmanuel Macron de sa volonté de transformer le pass sanitaire en pass vaccinal a immédiatement entraîné, comme c’était prévisible, des réactions négatives de la part des différents partis d’opposition et notamment de la quasi-totalité des candidats à la présidentielle. Seuls les soutiens habituels du président de la République ne l’ont pas critiquée, même si certaines réserves se sont faites jour.
Il y a « les violemment contre » qui invoquent les principes fondamentaux de la République pour dénoncer ce scandale que constituerait la création de deux catégories de Français : les vaccinés et les autres. Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon, ou encore Éric Zemmour ont rivalisé d’arguments pour expliquer leur opposition : effondrement de nos libertés individuelles, atteinte à la démocratie et aux libertés publiques, dictature sanitaire, lutte des classes vaccinale… ! Et promis un débat agité au Parlement.
Il y a « les modérément contre » qui s’appuient sur l’avis des sachants pour justifier leur refus : « je vais suivre les recommandations de l’OMS et aujourd’hui l’OMS ne le recommande pas », a relevé Yannick Jadot.
A l’opposé, il y a ceux qui soulignent que l’exécutif ne va pas assez loin pour ne pas avoir à dire qu’ils soutiennent sa décision. « C’est de la vaccination obligatoire, ne jouons pas sur les mots. Il faut cesser cette infantilisation permanente des Français » clame la maire de Paris, Anne Hidalgo, à l’unisson des parlementaires socialistes et notamment des sénateurs qui avaient déposé il y a quelques mois une proposition de loi en ce sens. « Repoussons d’une semaine la rentrée scolaire pour protéger les Français » propose Valérie Pécresse qui ajoute « le gouvernement n’a plus le choix, nous serons vigilants au Parlement ».
Mais ce flot de critiques n’a pas semblé convaincre l’opinion publique. Selon un sondage d’Odexa et Blackstone Consulting pour Le Figaro, publié le 24 décembre et donc passé un peu inaperçu, 2 Français sur 3 seraient favorables au pass vaccinal et 64% seraient même d’accord pour l’imposer au travail. Plus cruel pour les candidats de ces deux partis, 65% des sympathisants de la France Insoumise et 59% de ceux du Rassemblement National seraient pour la transformation du pass sanitaire en pass vaccinal. En juillet dernier, les Français avaient déjà, et très majoritairement, approuvé l’obligation de présenter un pass sanitaire dans de nombreuses situations. Ce sont peut-être ces résultats qui ont conduit Christiane Taubira, remarquée jusqu’alors pour son refus d’inciter les Français à se faire vacciner, à déclarer que « le gouvernement est dans son rôle quand il choisit le pass vaccinal ». Une manière habile de prendre une posture de femme d’Etat, responsable et en dehors des critiques, sans pour autant désavouer ses précédentes prises de position. Ou comment se présidentialiser avant même d’être officiellement candidate.
Face à la propagation fulgurante au cours des derniers jours du nouveau variant, le constat est incontestable : la campagne présidentielle se déroulera sur fond de pandémie. Et, dans l’immédiat, celle-ci est plutôt favorable au président de la République qui apparaît comme le protecteur de la Nation, celui qui prend les décisions difficiles mais indispensables tout en veillant à leur acceptabilité par l’opinion publique. Les Français choisiront eux-mêmes en se vaccinant ou pas, s’ils veulent continuer à aller au restaurant, au cinéma ou à voyager. Mais, en même temps, le Gouvernement fera tout ce qui est possible pour les convaincre de faire le bon choix.
A court terme, la crise sanitaire n’est donc pas un bon terrain pour l’opposition, ce qui ne veut pas dire qu’en avril prochain les Français ne poseront pas un regard différent sur les deux années qu’ils viennent de vivre. Mais explique la vigueur et l’énergie avec lesquelles les différents candidats se sont saisis dès vendredi soir du remplacement du drapeau français sous l’Arc de Triomphe à l’occasion du début de la Présidence française du Conseil européen. Alors que l’Assemblée nationale va examiner le projet de loi sur le pass vaccinal en séance publique le 3 janvier, retour à un débat identitaire bien balisé et forcément clivant.